Jean de La Bruyère,
Les Caractères
Synopsis (en 1 minute)

Attention, la Bruyère critique la "Cour" et les "Grands", mais c'est un moraliste, pas un révolutionnaire... Il ne remet pas en cause la monarchie... Il faut donc garder à l'esprit quelques éléments essentiels et le lire avec quelques clés de lecture.

D'abord, en bon moraliste il nous donne à voir des défauts humains, pour nous divertir, mais aussi pour nous corriger, c'est le grand théâtre du monde. Les Caractères c'est le plaisir d'observer et d'apprendre à devenir un « honnête homme »...

Mais de Livre en Livre, cela devient aussi une sorte de manuel de survie pour qui s'approche des classes sociales les plus élevées. Progressivement, la critique est de plus en plus dissimulée, mais bien présente, jusqu'au moment où il doit parler du Roi... La Bruyère se montre particulièrement prudent !

D'abord, à savoir : La Bruyère n'est pas noble mais grâce à son éducation, il devient précepteur chez le petit-fils du Grand Condé, cousin du Roi. Il est donc bien placé pour observer les puissants. On va voir que nos Livres V à X présentent une progression en difficulté (un peu comme un manuel de survie)...

⚜️ Livre V : De la Société et de la Conversation

D'une manière générale, sachons nous comporter en société pour participer aux conversations sans faire d'excès. La Bruyère critique les comportements hypocrites et vaniteux, contraires à l’art de la conversation.
Théodecte a si peu d'égard au temps, aux personnes, aux bienséances, que chacun a son fait sans qu'il ait eu l'intention de le lui donner ; il n'est pas encore assis qu'il a, à son insu, désobligé toute l'assemblée.

⚜️ Livre VI : Des Biens de Fortune

Apprenons à nous méfier de ces différences sociales qui surprendront souvent notre sens de la justice ! Le moraliste dénonce les excès des plus riches, des parvenus, et des ambitieux, interrogeant leur mérite.
Il faut une sorte d'esprit pour faire fortune, et surtout une grande fortune : ce n'est ni le bon ni le bel esprit, ni le grand ni le sublime, ni le fort ni le délicat ; je ne sais précisément lequel c'est, et j'attends que quelqu'un veuille m'en instruire.

⚜️ Livre VII : De la Ville

En ville, le théâtre des apparences est tel qu'il faut cultiver le discernement, car les jeux d’intérêts dissimulés menacent le bon fonctionnement de la société.
Une femme de ville entend-elle le bruissement d'un carrosse qui s'arrête à sa porte, elle pétille de goût et de complaisance pour quiconque est dedans, sans le connaître.

⚜️ Livre VIII : De la Cour

La Bruyère nous entraîne dans des milieux de plus en plus périlleux. À la cour, le moindre faux-pas peut provoquer notre perte. Évitons les intrigues… La Bruyère peint les défauts que l’on rencontre chez les courtisans.
On cherche, on s'empresse, on brigue, on se tourmente, on demande, on est refusé, on demande et on obtient ; « mais, dit-on, sans l'avoir demandé, et dans le temps que l'on y pensait pas [...] » : vieux style, menterie innocente, et qui ne trompe personne.

⚜️ Livre IX : Des Grands

C'est le niveau ultime ! Il vaut mieux ne jamais avoir affaire aux grands, car ils nous utiliseront pour leurs intérêts en nous traitant avec mépris… Ces remarques sur les défauts de la haute aristocratie montre l'écart avec ce qu'on attend de la hauteur de leur rang.
Si les grands ont les occasions de nous faire du bien, ils en ont rarement la volonté ; et s'ils désirent de nous faire du mal, il n'en trouvent pas toujours les occasions. Ainsi l'on peut être trompé dans l'espèce de culte qu'on leur rend, s'il n'est fondé que sur l'espérance ou sur la crainte.

⚜️ Livre X : Du Souverain et de la République

La Bruyère est prudent en faisant l'éloge de Louis XIV, auquel il fait confiance pour gouverner avec sagesse. La Bruyère donne au souverain un rôle primordial : c’est à lui de rassembler les plus hauts mérites.
Que de dons du ciel ne faut-il pas pour bien régner ! [...] Il me paraît q'un monarque qui les rassemble toutes en sa personne est bien digne du nom de Grand. (Titre que la ville de Paris vient d'attribuer à Louis XIV).

_{Anthony van Dyck, Autoportrait, ver 1640.}