Molière, Tartuffe Acte III, scène 2
Méthodologie du
commentaire composé
Extrait étudié
TARTUFFE, parlant bas à son valet, qui est dans la maison, dès qu’il aperçoit Dorine. Laurent, serrez ma haire avec ma discipline,
Et priez que toujours le ciel vous illumine.
Si l’on vient pour me voir, je vais aux prisonniers
Des aumônes que j’ai, partager les deniers.
DORINE, à part. Que d’affectation et de forfanterie !
TARTUFFE
Que voulez-vous ?
DORINE
Vous dire...
TARTUFFE, tirant un mouchoir de sa poche. Ah ! Mon Dieu ! je vous prie,
Avant que de parler, prenez-moi ce mouchoir.
DORINE
Comment !
TARTUFFE
Couvrez ce sein que je ne saurais voir.
Par de pareils objets les âmes sont blessées,
Et cela fait venir de coupables pensées.
DORINE
Vous êtes donc bien tendre à la tentation ;
Et la chair sur vos sens fait grande impression !
Certes je ne sais pas quelle chaleur vous monte :
Mais à convoiter, moi, je ne suis point si prompte :
Et je vous verrais nu du haut jusques en bas,
Que toute votre peau ne me tenterait pas.
Comment faire un commentaire composé sur une pièce de théâtre ? Et en particulier sur une comédie ? Je vais vous montrer pas à pas comment appliquer ma méthodologie sur un extrait de Tartuffe, la comédie de Molière. Pas besoin d'avoir lu la pièce pour suivre ma vidéo : ce n'est qu'un support dont je vais me servir pour appliquer ma méthode. Mais vous pouvez vous rafraîchir la mémoire éventuellement avec ma vidéo de synthèse sur Tartuffe.
Ma méthodologie contient 5 grilles de lectures et toute une série de conseils pour réaliser le plan, la problématique, l'intro et la conclusion.
Je vous conseille de commencer par regarder cette vidéo, c'est là que je présente toutes les techniques que je vais maintenant mettre en pratique.
Molière, Tartuffe, Acte III, scène 2. Je rappelle le contexte : Une famille est divisée par l'arrivée d'un individu qui manipule le père de famille, Orgon, avec son hypocrisie. Dans cet extrait, Tartuffe apparaît pour la première fois sur scène : cela fait tout de même deux actes entier que l'on entend parler de lui, et on ne l'a toujours pas vu. Les premières répliques permettent de cerner le personnage.
Je vous laisse mettre pause si vous voulez lire cet extrait. Vous pouvez aussi vous rendre en description pour télécharger le document PDF.
N'hésitez surtout pas à explorer la description : je vous mettrai également un tas de liens vers des vidéos utiles pour préparer le bac de français.
Première grille :
La structure du texte.
Premier point à regarder quand on a un texte versifié : la métrique. Comment sont construits les vers et les rimes ?
La pièce est entièrement rédigée en alexandrins, avec des rimes plates (sur un modèle AABBCC) : cette langue classique permet de condenser au maximum les effets, et notamment de mettre en valeur les cassures de rythme.
Regardez ici, Tartuffe interrompt Dorine avec indignation « … Ah ! Mon Dieu ! Je vous prie … couvrez ce sein » il fait semblant d'être offusqué par le décolleté de la suivante. Nous allons noter au fur et à mesure toutes nos trouvailles sur une feuille de brouillon : avec cette interruption, Tartuffe fait preuve d'une indignation excessive.
Certaines rimes sont signifiantes. Regardez par exemple :
discipline rime avec illumine > la discipline, c'est un fouet que les personnes très religieuses utilisent à l'époque pour se battre elles-mêmes en signe de repentance. L'illumination est aussi un peu excessive pour souhaiter simplement une bonne journée à son valet. Les deux termes montrent bien l'excès du personnage dans sa volonté de montrer sa dévotion.
Autre rime signifiante : forfanterie rime avec prie : l'écart entre le terme injurieux et le terme religieux est particulièrement drôle. Dorine traite Tartuffe de malhonnête pendant qu'il se comporte de façon excessivement polie. Cette rime signifiante contribue à démasquer l'hypocrisie de Tartuffe tout en le rendant ridicule.
Comment est répartie la parole dans notre passage ? On peut dire que Tartuffe parle un peu plus que Dorine, c'est normal : Tartuffe est le personnage qu'on souhaite découvrir, Dorine donne la réplique. On peut noter que cette répartition de la parole nous permet de mieux découvrir ce personnage qui donne son nom au titre de la pièce.
Les verbes de parole nous permettent d'aller un peu plus loin dans l'analyse, regardez. Dorine veut dire quelque chose à Tartuffe, mais celui-ci refuse de lui parler. Nous sommes dans une rupture de communication, Pour différentes raisons, vous allez voir que Tartuffe est effectivement exclu du lien social.
Essayons maintenant de découper notre passage en plusieurs parties. Nettement, nous avons deux étapes : d'abord, Tartuffe s'adresse à son valet, mais en réalité il se donne en spectacle, et Dorine n'est pas dupe, puisqu'elle parle d'affectation. Cette première partie montre que l'hypocrisie, c'est déjà de la comédie. Tartuffe fait du théâtre dans le théâtre.
La deuxième partie est centrée autour du jeu avec le mouchoir. Molière révèle tout de suite une thématique importante : l'hypocrisie est un jeu constant avec ce qui est montré et ce qui est caché. Cette deuxième partie insiste sur le jeu avec les apparences.
Dans notre passage, les liens logiques ne sont pas très nombreux, nous ne sommes pas dans un raisonnement logique, mais plutôt dans des effets d'accumulation. Tartuffe utilise des liens d'addition : « Et priez toujours le ciel … Et cela fait venir de coupables pensées » puis une hypothèse « Si l'on vient pour me voir, je vais aux prisonniers partager mes deniers » On comprend tout simplement qu'il ne manque pas une occasion de montrer sa dévotion aux yeux de tous.
Dorine utilise aussi un lien logique « Que d'affectation et de forfanterie » elle saisit quant à elle toutes les occasions de montrer l'hypocrisie de Tartuffe. Ce lien logique d'addition met en valeur l'insulte : la forfanterie. Dorine fait tomber le masque de l'hypocrisie aux yeux du spectateur.
Deuxième grille :
Les personnes et les sujets
D'abord, qui sont les personnages en présence ? Dorine, c'est la suivante de Mariane. Dès le début de la pièce on la dit « un peu trop forte en gueule » en effet elle n'hésitera pas à dire la vérité pour déjouer l'hypocrisie.
Tartuffe, c'est la première fois qu'il apparaît sur scène, mais on sait qu'il est accueilli et entretenu par Orgon, le père de famille. On devine dès la première scène que c'est un profiteur hypocrite. Il est accompagné par son valet Laurent qui n'apparaît que dans cette scène.
Nos deux personnages sont donc complètement opposés : Dorine est du côté de la vérité, tandis que Tartuffe est du côté du mensonge. Ce n'est pas un hasard si cette première apparition de Tartuffe est mise en scène avec Dorine. Le contraste entre les deux personnages va nous aider à mieux cerner le personnage de Tartuffe.
Comment ces personnages sont-ils représentés par les pronoms personnels à travers notre passage ? Tartuffe est le seul à utiliser la première personne « ma haire … ma discipline … me voir … je vais … j'ai … Je vous en prie … prenez-moi … je ne saurais voir » il se donne pour ainsi dire en spectacle aux deux valets qui sont présents.
Par ailleurs, il distribue les rôles, avec des impératifs « serrez ma haire avec ma discipline … priez le ciel » quand il s'adresse à Laurent. « prenez-moi ce mouchoir … couvrez ce sein » quand il s'adresse à Dorine. Pour ainsi dire, c'est lui le grand metteur en scène de ce passage.
D'ailleurs, le pronom indéfini est révélateur « Si l'on vient pour me voir » que désigne ce « on » ? Toute personne qui vient le voir. Le spectateur lui-même peut donc se sentir visé. Tartuffe est donc constamment en représentation. Ainsi, les pronoms personnels révèlent un véritable théâtre dans le théâtre.
Que peut-on dire des reprises anaphoriques ? À la fin du passage « Couvrez ce sein que je ne saurais voir … de pareils objets … cela fait venir ». D'abord, Tartuffe utilise le singulier alors que Dorine a deux seins évidemment. C'est une figure de style qui s'appelle la syllepse par le nombre : on utilise le singulier pour le pluriel. Tartuffe est déjà dans l'atténuation et donc dans la dissimulation.
Nous avons deux reprises anaphoriques, d'abord une périphrase très générale : « de pareils objets », puis le pronom démonstratif neutre « cela ». Le langage de Tartuffe mime la dissimulation : nous sommes typiquement dans le jeu avec les apparences.
Tartuffe est souvent le sujet des verbes « je vais … j'ai … je vous prie … je ne saurais voir » sauf à la fin justement : « Les âmes sont blessées par de pareils objets // Et cela fait venir de coupables pensées » tout se passe comme si les coupables pensées venaient toutes seules, avec la voix passive qui laisse entendre que les âmes sont les victimes de cette vision impudique.
Tartuffe fait semblant d'être dévot, mais il est bien sensible aux charmes féminins. Cela annonce la suite immédiate de la pièce, où Tartuffe tente de séduire Elmire, la maîtresse de la maison, par pure concupiscence.
Souvent, les verbes psychologiques et les verbes de perception donnent des indications sur la subjectivité des personnages, mais c'est un phénomène beaucoup plus important dans le roman qu'au théâtre. Dans notre passage nous n'avons pas de verbe psychologique « penser, rêver » ni de verbe de perception.
Troisième grille de lecture :
L'espace et le temps
Regardons d'abord la valeur des temps. Nous allons revenir rapidement sur des choses que nous avons déjà repérées. L'impératif permet de donner un ordre : « serrez … priez … prenez … couvrez » : Tartuffe met en scène un théâtre dans le théâtre en distribuant les rôles.
Ces impératifs montrent aussi autre chose : Tartuffe se comporte déjà comme le maître des lieux. Il apporte son valet dans la maison (ce qui est une marque d'impolitesse à l'époque). Il donne des ordres à Dorine, qui est pourtant la suivante de Mariane. Il va et vient à sa guise comme s'il était chez lui. Cela annonce la suite de la pièce, où Tartuffe réussira à s'approprier toutes les possessions d'Orgon.
Le présent de vérité générale : pour exprimer des faits valables de tout temps. Tartuffe cache sa concupiscence derrière de fausses maximes : « par de pareils objets les âmes sont blessées // Et cela fait venir de coupables pensées. » Derrière ces vérités générales, le spectateur découvre le véritable visage de Tartuffe.
Nous avons également un conditionnel « que je ne saurais voir ». Le mode conditionnel permet d'exprimer ici une hypothèse. Tartuffe fait l'hypothèse qu'il pourrait voir ce sein, mais que son statut de dévot l'en empêche. Le verbe savoir a ici un sens très particulier, il se rapproche du verbe pouvoir. Toute l'hypocrisie de la situation nous apparaît, car en effet il a très bien vu ce qu'il feint de ne pas pouvoir voir. Ce conditionnel participe donc au jeu avec les apparences.
Nous avons quelques indications de mouvements et de lieu, avec notamment les verbes de mouvement aller et venir. « Si l'on vient pour me voir, je vais aux prisonniers » : dès qu'il aperçoit Dorine, Tartuffe se rend indisponible, la sortie au prisonniers est manifestement un prétexte. Il ne veut même pas communiquer directement avec elle, il s'adresse à son valet, en espérant qu'il fasse passer le message.
De même, dès que Dorine lui parle, il l'interrompt tout de suite en tirant un mouchoir de sa poche. C'est un geste symbolique : Tartuffe a plusieurs tours dans sa poche, et il s'en sert pour tenir Dorine à distance. Les mouvements dans notre passage montrent un personnage de Tartuffe complètement coupé de la vie en société et des relations sociales.
En effet, chez Molière, la sagesse populaire et le bon sens se trouvent du côté de la vie en société. Il n'est jamais bon de se couper du groupe. À travers toute son œuvre, Molière dénonce des comportements antisociaux : l'avare, l'hypocondriaque, l'hypocrite, le misanthrope…
Les verbes d'action concernent d'abord la religion « prier … illuminer … partager l'aumône … prier … blesser les âmes » tout ces verbes liés à la religion vont dans le sens d'une dévotion ostentatoire.
Les autres verbes d'action sont du côté de la mise en scène « serrer … aller … venir … tirer … prendre … couvrir » ce sont autant d'occasions pour les acteurs d'exagérer les gestes, afin de mettre en valeur la dimension comique de cette scène.
Quatrième grille de lecture :
La syntaxe et le rythme.
Dans notre passage, les phrases courtes coïncident avec les exclamations et les interrogations. Tartuffe interroge Dorine très sèchement « Que voulez-vous ? » 4 pieds seulement. Cela confirme que Tartuffe n'a aucune envie de prolonger son entretien avec Dorine, il se met en dehors des relations sociales.
Tartuffe fait deux interjections « Ah ! Mon Dieu ! » il s'offusque de façon exagérée sur le décolleté de Dorine. Il fait preuve d'une indignation excessive et se donne en spectacle.
Dorine s'exclame aussi : « Que d'affectation et de forfanterie ! » et elle ne comprend pas pourquoi Tartuffe lui tend un mouchoir « Comment ! » ce sont des expressions de surprise. Cette interruption est astucieuse, car le spectateur lui-même ne comprend pas pourquoi Tartuffe sort un mouchoir : ce n'est pas l'utilisation habituelle que l'on fait de cet objet. Ce décalage montre bien que Tartuffe est dans une indignation excessive.
En effet, chez Molière, la sagesse se trouve dans la modération, et tout ce qui est extrême est mauvais. Ainsi, la surprise de Dorine est salutaire. Elle souligne l'écart entre la bonne mesure nécessaire en société et les exagérations de Tartuffe.
Au théâtre, les passages en italique sont ce qu'on appelle des didascalies : ce sont des indications de mise en scène. C'est toujours particulièrement intéressant à commenter. Ici nous avons tout de suite « parlant bas à son valet, qui est dans la maison, dès qu'il aperçoit Dorine » Le spectateur découvre d'emblée un personnage de Tartuffe comploteur, qui parle bas. Avant même ses premières répliques, nous découvrons un personnage manipulateur.
Deuxième didascalie, Dorine dit sa réplique « À part » c'est ce qu'on appelle au théâtre un aparté : une réplique destinée uniquement au public, et que les autres personnages sur scène n'entendent pas. Dorine est l'intermédiaire de l'auteur sur scène : elle nous donne déjà des clés pour comprendre le fonctionnement du personnage de Tartuffe.
La forfanterie, c'est une fanfaronnade qui consiste à étaler ses vertus. C'est exactement ce que fait Tartuffe ici. La justesse de la remarque de Dorine renforce le comique de l'attitude de Tartuffe qui se montre excessivement poli.
Troisième didascalie « Tirant un mouchoir de sa poche » : Molière guide le jeu des acteurs notamment en utilisant ici le participe présent qui insiste sur la durée du geste. Ces indications renforcent le comique de la pièce.
Dans notre passage, les virgules viennent particulièrement rythmer les vers à l'hémistiche : au milieu de l'alexandrin :
« Si l'on vient pour me voir, je vais aux prisonniers »
« Des aumônes que j'ai, partager les deniers »
« Avant que de parler, prenez moi ce mouchoir ». Tartuffe place ces parties de phrase en tête d'alexandrin, pour se mettre en valeur. C'est un acteur soucieux de ses effets : nous assistons à du théâtre dans le théâtre.
Cinquième grille de lecture :
Les images.
On trouve d'abord à travers tout le passage le champ lexical de la religion. Tout d'abord, la « haire » est une chemise en crin très irritante, portée en signe de contrition, pour se punir de ses péchés. Tartuffe montre cette chemise qui devrait normalement être cachée sous ses vêtements : c'est un jeu hypocrite avec les apparences.
Le champ lexical de la religion est abondant : « haire … prier … ciel … aumône … partager … Dieu … prier … âmes » cette abondance de termes religieux démontre une dévotion ostentatoire.
De même l'adjectif « coupable » va dans le sens de la contrition. Tartuffe se rend intouchable parce qu'il se punit déjà lui-même. Cela annonce la suite de la pièce, quand il parviendra à déjouer les dénonciations des autres personnages en exagérant sa culpabilité.
Dans notre passage, les sonorités vont accentuer certains mots, regardez : « Laurent, serrez ma haire » on repère une allitération en R qui accentue la dureté et la gravité du dévot qui se mortifie. L'allitération, c'est le retour d'un son consonne. Ces allitérations en R participent à l'aspect ostentatoire de la dévotion de Tartuffe.
Les interventions de Tartuffe sont en effet particulièrement sonores. Dans sa première réplique, le verbe « prier » fait écho à « prisonniers » tandis que dans la deuxième réplique, le verbe « prier » fait écho au verbe « prendre ». De même « Par de pareils objets » donne l'impression qu'il bégaye. On peut y voir une volonté de décrédibiliser le personnage et de le rendre ridicule, avec un acteur qui accentue exprès la diction roulante, bégayante, postillonnante.
Du côté de Dorine, les allitérations en F viennent mettre en valeur sa dénonciation « Que d'affectation et de forfanterie » En plus, on est obligés de prononcer le « i » comme un pied entier dans « affectation » c'est ce qu'on appelle une diérèse : une voyelle seule est prononcée comme un pied pour respecter la versification. Les sonorités de cette réplique participent à la volonté de Dorine de faire tomber le masque de l'hypocrisie.
Tartuffe fait une métaphore à la fin de notre passage, mais vous allez voir qu'elle ne fonctionne pas bien : c'est justement une manière pour Molière de dénoncer l'hypocrisie de Tartuffe. « Par de pareils objets les âmes sont blessées » les objets, donc les seins, sont comme des armes qui blessent, et les âmes sont comparées à des victimes : le point commun, c'est la douleur physique provoquées par les coupables pensées.
Cette métaphore est exagérée évidemment puisque Tartuffe n'est en fait la victime que de sa propre concupiscence. La comparaison des coupables pensées, immatérielles, avec des blessures physiques, matérielles, est un raccourci un peu trop forcé. Cette métaphore dénonce ainsi l'indignation excessive de Tartuffe.
On peut remarquer un autre jeu matériel / immatériel, regardez : Tartuffe parle du ciel qui illumine : nous sommes du côté du spirituel. Et pourtant, la haire, la discipline, les deniers, tout cela nous ramène au corps, à l'argent, à des choses très triviales et concrètes. Avec ces écarts, Molière dénonce le fait que Tartuffe est dans un jeu avec les apparences : un véritable dévot n'aurait pas besoin de faire autant de grimaces.
Axes de lecture
Nous avons donc 9 grands thèmes qui ressortent de notre analyse, et qui vont nous aider à construire nos axes de lecture.
> Une indignation excessive.
> La découverte du personnage de Tartuffe par le spectateur
> Une dévotion ostentatoire.
> L'hypocrisie est démasquée notamment par Dorine.
> Le théâtre dans le théâtre.
> Un jeu avec les apparences.
> Des annonces de la suite de la pièce.
> Un personnage de Tartuffe hors des relations sociales.
> Tartuffe ridiculisé.
La première partie va couvrir les thèmes les plus évidents, les émotions, le registre principal. D'abord le spectateur découvre Tartuffe : on est un peu obligés de commencer par là, puisque toutes les autres parties vont détailler son rôle ensuite. La caractéristique principale de Tartuffe, c'est bien la dévotion ostentatoire, qui le rend ridicule. On fait un sort au registre comique dès la première partie, qu'on pourra intituler : « Un faux dévot ridicule ».
Deuxième partie : il s'agit de mettre en perspective les éléments de la première partie. Nous allons tout de suite montrer comment Molière parvient à dénoncer l'hypocrisie de Tartuffe, avec le passage du mouchoir qui révèle son indignation excessive et qui symbolise tout son jeu avec les apparences. Je propose d'intituler notre deuxième partie : « Les dessous de l'hypocrisie ».
Troisième partie : quel est l'objectif de Molière avec cette scène, que cherche-t-il à faire ? Quel est le rôle de ce passage dans l'évolution générale de l'intrigue ? Molière utilise les ressources de la comédie, et notamment le théâtre dans le théâtre pour nous annoncer à l'avance les trahisons à venir de Tartuffe, et montrer le danger que représentent les hypocrites et les faux dévots pour la société. On pourra intituler cette troisième partie « le théâtre pour corriger la société ».
Si vous manquez de temps, et que vous n'avez pas grand chose en deuxième et troisième partie, vous pouvez les fondre et rester sur un plan en deux parties, mais le correcteur se montrera alors plus exigeant.
Vous voyez que mon plan suit une logique, un véritable raisonnement : Tartuffe est ridicule, et son hypocrisie est déjouée, mais il reste dangereux tant qu'il parvient à manipuler Orgon le maître de la maison. Avec cette pièce, Molière invite indirectement le Roi Louis XIV lui-même à se méfier des faux dévots. Avec ce plan, on tient déjà notre problématique :
Comment Molière met-il en scène de façon comique cette première apparition de Tartuffe pour dénoncer l'hypocrisie qu'il estime dangereuse pour la société ?
Vous voyez que cette problématique articule nos trois parties : l'apparition de Tartuffe, la dénonciation de l'hypocrisie, le danger pour la société, mais aussi le comment, le quoi et le pourquoi.
Sous-parties
Avant de passer à la rédaction, nous allons organiser chaque partie. D'abord, pour la première partie, « Un faux dévot ridicule » nous allons garder uniquement les éléments en bleu. Regardez, trois sous-parties se détachent
1) La découverte du personnage de Tartuffe,
2) Une dévotion ostentatoire
3) Un personnage ridicule
On peut ensuite réorganiser les arguments au sein de chaque sous-partie en supprimant les plus faibles et en gardant les meilleurs pour la fin.
En effet, rien ne nous oblige à parler absolument de tout, les grilles de lectures servent surtout à vous donner de la matière et à faire émerger les meilleures idées.
Pour la deuxième partie « Les dessous de l'hypocrisie », nous allons garder uniquement les éléments en jaune. Nos trois sous-parties apparaissent :
1) Démasquer l'hypocrisie
2) Une indignation excessive
3) Un jeu avec les apparences
Et on réorganise les arguments en supprimant les plus faibles, et en gardant les meilleurs pour la fin.
Vous verrez avec la pratique qu'il faut parfois tordre un peu le plan de manière artificielle si on veut obtenir trois parties et trois sous-parties homogènes.
Pour la troisième partie « Le théâtre pour corriger la société », on garde les éléments en vert et on organise enfin nos trois sous-parties :
1) Le théâtre dans le théâtre
2) La suite de la pièce est déjà annoncée
3) Tartuffe hors du lien social
Je vous laisse comme d'habitude arranger les arguments.
Si la dernière sous-partie vous semble un peu légère, n'hésitez pas à raconter un peu la suite de la pièce avec une citation efficace, par exemple le moment où Tartuffe tombe définitivement le masque :
C’est à vous d’en sortir, vous qui parlez en maître.
La maison m’appartient, je le ferai connaître.
Ce sera moins technique sur la fin, mais on montrera au correcteur qu'on connaît bien notre sujet.
Rédiger l’introduction
Nous sommes maintenant prêts à rédiger l'introduction, et nous avons d'abord besoin d'une accroche en rapport avec notre développement, une accroche qui insiste sur la dénonciation de l'hypocrisie. On peut parfaitement utiliser une citation tirée de la préface de Molière, où il dénonce l'hypocrisie comme un vice particulièrement dangereux :
Si l’emploi de la comédie est de corriger les vices des hommes je ne vois pas par quelle raison il y en aura de privilégiés. Celui-ci est, dans l’État, d’une conséquence bien plus dangereuse que tous les autres [...]
C'est une accroche qui est pratiquement toujours efficace pour introduire un extrait de Tartuffe, je vous conseille de l'apprendre par cœur si vous travaillez sur cette œuvre.
Ensuite, on relie la pièce à cette anecdote, ce qui nous permet de faire une description rapide de l'oeuvre :
La pièce de Tartuffe raconte comment ce personnage hypocrite parvient manipuler Orgon, le père de famille, afin de s'approprier tous ses biens.
Maintenant, on peut situer le passage dans l'oeuvre :
Dans notre passage, Tartuffe apparaît pour la première fois : après deux actes entiers où le spectateur entend constamment parler de lui. Son premier échange avec Dorine représente bien le personnage, faux dévot, manipulateur, son hypocrisie apparaît tout de suite aux yeux du spectateur.
On passe à la ligne avec un alinéa, et on recopie la problématique :
Comment Molière met-il en scène de façon comique cette première apparition de Tartuffe pour dénoncer l'hypocrisie, qu'il estime dangereuse pour la société ?
On passe à la ligne avec un alinéa, et on annonce le plan :
D'abord, nous allons voir que Tartuffe apparaît d'emblée comme un faux dévot ridicule.
Puis nous verrons comment sont dénoncées les stratégies de l'hypocrite.
Enfin, cette scène illustre bien comment Molière utilise le théâtre pour corriger la société.
Je vous conseille de toujours utiliser des liens logiques pour annoncer chaque partie, dans trois phrases différentes. N'hésitez pas à conserver ces tournures de phrases à la première personne du pluriel.
Rédiger la conclusion
Maintenant, nous sommes prêts à rédiger la conclusion. D'abord, on résume tout notre raisonnement, ce qui revient à répéter le plan, de manière un peu enrichie :
Nous avons vu que Molière nous présente tout de suite Tartuffe comme un faux dévot ostentatoire et ridicule. Mais il sait jouer avec les apparences, et Dorine, avec ses apartés et sa franchise, qui nous fait voir les exagérations de son discours. Le théâtre révèle que l'hypocrite n'est qu'un acteur et annonce déjà ses trahisons. Avec cette pièce, Molière utilise la comédie pour dénoncer les faux dévots aux yeux de Louis XIV.
Enfin, on peut terminer avec une petite ouverture sur la dimension intemporelle de la pièce :
Mais la pièce de Tartuffe reste d'actualité, car au-delà de la fausse dévotion, Molière mène une réflexion d'ordre philosophique sur l'hypocrisie, qui brise le lien social, et détourne le bien commun vers l'intérêt individuel.
Cette ouverture est d'ailleurs suffisamment générale pour s'adapter à presque n'importe quel passage de la pièce.
Vous pouvez maintenant passer à la rédaction, pensez bien à toujours utiliser des liens logiques entre les paragraphes, et à rédiger des transitions entre vos parties en soulignant la continuité de votre raisonnement !
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